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Bilinguisme : définition, idées reçues et avantages

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Le bilinguisme fait rêver, inquiète parfois, décourage souvent… Et si on prenait le sujet à bras le corps, pour contrer les idées reçues et défier ceux qui nous freinent dans nos ambitions ? Nous vous proposons de comprendre ce qu’est le bilinguisme, ce qu’il génère comme difficultés ou non dans l’acquisition du langage, et comme bénéfices dans le développement de l’enfant en général. Et surtout, nous vous invitons à découvrir les nombreux avantages du bilinguisme démontrés par de récentes études en neurosciences.

Enfants bilingues en classe

Être bilingue, ça veut dire quoi ?

On considère un individu comme bilingue s’il est exposé à deux langues, et s’il est capable de les utiliser régulièrement dans la vie quotidienne, sans forcément les maîtriser parfaitement.

En effet, la maîtrise de chacune des langues varie d’une personne à une autre. Il est très rare d’avoir un bilinguisme total, c’est-à-dire identique dans chacune de ses langues. Il y a très souvent chez les bilingues une langue dominante. De plus, cette variabilité entre les deux langues évolue au cours de la vie, en fonction des besoins de l’individu. Par exemple on peut vivre dans le pays de sa langue A puis déménager dans le pays de sa langue B, et notre langue dominante change.

On parle de bilinguisme précoce lorsque l’exposition à la seconde langue se fait avant l’âge de 6-7 ans, alors que l’enfant est encore dans sa phase de construction du langage. Si la seconde langue est introduite avant l’âge de 3 ans, le bilinguisme est qualifié de simultané, sinon il est dit consécutif. A partir de 11-12 ans, l’apprentissage peut être moins spontané notamment si l’enfant, conscient du risque d’erreur, s’exprime moins spontanément.

Au-delà de la maîtrise linguistique, les bilingues vont petit à petit s’exprimer avec tous les codes sociaux qui accompagnent chacune de leur langue. Connaissant deux cultures, ils ont accès à deux mondes auxquels ils s’adaptent sans difficulté. Manier l’humour est une belle preuve de cette aisance. Être bilingue implique donc une maîtrise de deux langues mais aussi une capacité d’adaptation à deux cultures différentes.

Les idées reçues, à combattre absolument !

Le bilinguisme est une exception.

FAUX. On estime que 65 à 70% de la population mondiale est bi- ou multilingue !

Il suffit d’entendre une langue pour être bilingue.

FAUX. L’exposition répétée, la pratique et le renforcement positif sont les clés d’un apprentissage efficace.

Le bilinguisme entraîne un retard dans l’acquisition du langage.

FAUX. Le développement du langage chez un enfant exposé à plusieurs langues se fait en moyenne au même âge que chez un enfant monolingue (il existe cependant une grande variabilité individuelle).

Les enfants souffrant de troubles du langage doivent n’être exposé qu’à une seule langue.

FAUX. Le bilinguisme n’est pas la cause de troubles du langage ou de troubles de l’apprentissage, et il ne faut surtout pas cesser d’exposer un enfant à sa langue maternelle.

Pour être bilingue, il faut avoir appris deux langues dès la naissance.

FAUX. Le bilinguisme peut s’acquérir à tout moment de la vie. Bien sûr, il sera plus facile de devenir bilingue pour un enfant dont le cerveau plastique présente des capacités très élevées pour les apprentissages en général et ceux d’autres langues en particulier.

Les avantages du bilinguisme

Les bénéfices du bilinguisme sont multiples. Cette courte vidéo nous explique comment devenir bilingue rend notre cerveau plus sain, plus actif, et plus complexe. Elle introduit aussi la définition d’un bilingue composé, coordonné, ou subordonné, 3 catégories dans lesquelles on peut classer les bilingues en fonction de la façon dont ils ont été exposés à leur deuxième langue.

Le bilinguisme favorise le développement cognitif et un meilleur contrôle des fonctions exécutives situées dans le lobe préfrontal du cerveau. Le cortex des bilingues étant plus sollicité par l’usage de leurs langues, ils pourront développer de meilleures fonctionnalités situées dans cette partie du cerveau telles que la mémoire de travail, l’initiation de tâches, l’organisation et la planification, l’autorégulation et la flexibilité mentale, le contrôle des émotions et des impulsions.

Concrètement cela se traduit par des avantages dans plusieurs domaines :

Une plus grande capacité de concentration

Dans cet article de Psychology Today, Judy Willis explique que pendant l’enfance notre capacité à ne pas être distrait et donc à rester concentré est minime. Cette capacité située dans la partie frontale de notre cerveau, le cortex, murît jusqu’à 25 ans environ. Or c’est dans cette région du cerveau que s’opère également le choix de la langue à utiliser. Le cerveau des bilingues analyse sans cesse la langue à utiliser, requérant de ce fait une attention délibérée qui muscle de manière générale leur capacité de concentration.

Des facilités à effectuer plusieurs tâches en même temps

Pour passer fréquemment d’une langue à une autre, les bilingues sont obligés d’être attentifs à ce qui les entoure afin de s’adapter rapidement aux changements intervenant dans leur environnement. Leur cerveau développe ainsi une agilité qui les rend plus aptes à effectuer plusieurs tâches en même temps, comparativement aux personnes monolingues du même âge.

Des aptitudes linguistiques

Les bilingues ont une meilleure compréhension du concept de langage et pourront donc plus facilement acquérir une nouvelle langue pendant l’enfance ou à l’âge adulte. Déjà habitués à passer d’une langue à l’autre, ils pourront en parler d’autres tout en conservant cette capacité à « switcher » entre les langues.

Un cerveau plus agile, qui apprend facilement

Puisqu’il sollicite la zone du cerveau des fonction exécutives, le bilinguisme favorise une meilleure capacité de raisonnement et un traitement plus rapide de l’information. Ces atouts font des bilingues de meilleurs apprenants en général, comme l’explique cette étude publiée en 2012.

Et qui semble vieillir moins vite

Présentée dans le magazine Sciences et Vie, une étude publiée en août 2017 explique que les bilingues utilisent moins de zones de leur cerveau mais de manière plus intense. Cet entrainement à « l’économie cérébrale » pourrait ainsi ralentir le processus de vieillissement du cerveau, comparativement aux personnes monolingues, et repousser l’apparition de maladies neurodégénératives comme la démence sénile ou la maladie d’Alzheimer.

Une belle ouverture d’esprit

Les avantages du bilinguisme ne sont pas réservés qu’aux fonctionnalités cérébrales bien sûr. Être bilingue c’est accéder à deux cultures, à deux façons de penser. Faire partie de deux mondes, c’est surtout la chance d’avoir une ouverture d’esprit sur le monde et les autres.

Combien de langues peut-on apprendre ?

Enfant bilingue franco-allemand

Nous parlons ici de bilinguisme mais cela concerne aussi les personnes qui seraient immergées dans plus de 2 langues. Notre cerveau peut sans problème apprendre plusieurs langues, notamment celui des enfants entre 0 et 5 ans.

Les parents sont de plus en plus nombreux à comprendre les bénéfices d’un bilinguisme précoce, mais beaucoup demeurent hésitants à l’idée de confronter leurs enfants à 3 langues ou plus. Si vous vous demandez combien de langues un enfant peut apprendre sans que ce soit contre-productif, vous pouvez regarder sur YouTube cette interview de psycholinguistes et d’un professeur dans une école où l’on apprend plusieurs langues à la fois.

Nous l’avons dit, les enfants bilingues possèdent très tôt une langue dominante et ceci est très important car c’est à partir de la langue dominante que vont pouvoir se développer les autres langues. Le langage se développe en faisant des ponts entre les différentes langues. Lorsqu’un enfant acquière la maîtrise d’une langue à un niveau complexe, elle devient alors sa langue dominante, et il va donc se servir de ses compétences métalinguistiques pour « tirer vers ce niveau » l’apprentissage d’autres langues.

Il en est de même pour les adultes. C’est pour cette raison que les polyglottes vous diront souvent que plus ils apprennent de langues, plus cela leur semble facile. Certains deviennent même hyper-polyglottes, Tim Doner et Vladimir Skultety expliquent dans cette interview leurs stratégies et les raisons qui les poussent à continuer l’apprentissage de nouvelles langues.

Le développement du langage chez les enfants bilingues

Quelles sont les particularités du développement du langage pour les enfants exposés à plusieurs langues ? Y a t’il des difficultés à prendre en compte ? Rappelons d’abord que les enfants bilingues commencent à parler en moyenne au même âge que les enfants monolingues.

A noterPour avoir en tête les différentes étapes de l’acquisition du langage, le Ministère de la Santé a créé un tableau des repères de l’évolution du langage chez l’enfant.

Voici 4 particularités que les parents d’enfants bilingues peuvent constater, sans qu’il y ait de raison de s’alarmer :

  • Lorsque le bilinguisme est consécutif, il est fréquent que l’enfant ne s’exprime pas dans la nouvelle langue pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Pendant cette période silencieuse, l’enfant enregistre cependant de nombreuses informations, et le fait qu’il réponde dans sa langue maternelle ne signifie pas qu’il ne comprend pas la nouvelle.
  • Les enfants multilingues peuvent connaître moins de vocabulaire dans chacune des langues qu’un enfant monolingue. Cependant, si l’on considère les deux langues, leur répertoire est au moins aussi vaste que celui d’un enfant monolingue.
  • Les enfants bilingues construisent souvent des phrases comprenant des mots dans les 2 langues, ce qu’on appelle du code switching. Cependant, ils ne “mélangent” pas les langues, étant tout à fait capables de dire quels termes sont français et quels termes sont dans l’autre langue.
  • Vous pourrez observer des erreurs grammaticales plus fréquentes que chez les enfants monolingues, dues à la nécessité d’utiliser deux systèmes syntaxiques différents.

Si vous êtes inquiets sur le développement du langage de votre enfant, lisez notre article sur les troubles du langage et de la parole chez les enfants bilingues.

Peut-on oublier sa langue maternelle ?

Oui, cela s’appelle l’attrition. Le bilinguisme n’est pas acquis pour la vie, que ce soit chez un enfant ou chez un adulte. Le phénomène d’attrition peut notamment s’observer dans des situations émotionnelles très fortes où les enfants pensent qu’il est nécessaire d’abandonner une langue pour leur bien ou pour leur intégration.

Il arrive aussi qu’une langue ne soit plus du tout utilisée et s’oublie peu à peu, même si on peut observer une certaine réminiscence des années plus tard, et cela de façon variable selon les individus. L’âge joue aussi un rôle important. Plus un enfant est jeune quand une de ses langues s’affaiblit, plus l’oubli sera rapide et irréversible.


Pour aller plus loin

Voici une liste de quelques spécialistes sur la question du bilinguisme. Beaucoup de leurs publications concernent le bilinguisme des enfants et adolescents, elles vous aideront à enrichir vos connaissances sur le sujet et à vous convaincre encore plus s’il le fallait, que le bilinguisme est un formidable cadeau à leur offrir. Bonne lecture !

François Grosjean, professeur honoraire et créateur du Laboratoire de traitement du langage et de la parole à l’université de Neuchâtel, Suisse.
Barbara Abdelilah-Bauer, psychosociologue et consultante, enseignante à l’université Paris Descartes
Francine Couëtoux-Jungman, Université Paris Descartes
Nathalie Auger, professeur à l’université Paul Valéry, Montpellier
Christelle Dodane, Maitre de conférences en Phonétique à l’université Paul Valéry, Montpellier III
Laura-Ann Petitto, University of Toronto, Psychology, Faculty Member.

Extrait de la bannière Devenir BilingueC’est pour vous accompagner tout au long de ce chemin que DevenirBilingue.com a été créé en 2014. Découvrez sur notre site des conseils d’experts pour construire votre parcours vers le bilinguisme, quel que soit votre âge. Et pour vous aider dans l’apprentissage et le maintien du français chez des enfants bilingues, consultez notre rubrique « Conserver et transmettre le français » qui regorge d’astuces et de retours d’expérience de familles multilingues ou vivant à l’étranger.

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